Déjà en 1813 Des bergers armés et des préfets qui décident, ce n'est pas nouveau...

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Des bergers armés, des mesures de protection, des battues…. Et des préfets qui prenaient des décisions, tout ceci existait au 19eme siècle. Au 21eme, des mesures similaires sont prises. Rien de très nouveau. Néanmoins, dans le passé, des mesures d’éradication ont été prises. Nul doute qu’à moyen terme, nous reviendront aux mêmes objectifs. Aucune autre solution n’étant possible pour sauvegarder le pastoralisme.

- Des adultes armés pour garder les troupeaux.

Quand le loup impose à l'homme de changer ses pratiques pastorales : l'arrêté du Préfet de Haute-Saône du 3 juillet 1813 (Arch. nat. F 10/471).

"Un très beau texte d'histoire rurale : travail des enfants ; calendrier des travaux agricoles ; interdiction du pâturage privé (le "parcours à proie séparée") et passage au pâturage collectif et même intercommunautaire; lecture à l'issue de la messe des arrêtés publics... en dehors de la question du loup, cette réaction – prise dans un contexte extrême mais non point exceptionnel, le subdélégué Lafont avait préconisé la même chose à l'époque de la Bête du Gévaudan – appelle de nombreux commentaires qui touchent à l'histoire des campagnes. Aujourd'hui les préfets ont retrouvé, à l'égard du loup, une position (notamment entre l'Etat central et les collectivités territoriales) qui leur était habituelle deux siècles auparavant".

Auteur:
Jean-Marc Moriceau sur le groupe Facebook du "Pôle Rural" du 29 septembre 2015


"Vu le rapport que lui a fait le 1er de ce mois le sous-préfet de Gray, contenant que le 25 juin dernier, entre 7 et 8 heures du matin, la fille unique de Jean François Gardot, âgée de 10 ans, a été dévorée par un loup, à une portée de fusil du village de Chancey, au moment où elle cueillait de l’herbe sur un champ, et que le 28 du même mois, le même loup ou un autre, a dévoré la fille de la veuve de Jean Charbonnet de Cult, âgée de 12 ans, qui gardait un troupeau près du village;

"Considérant que les battues pour faire la chasse à ces bêtes féroces sont impraticables, sans résultat, dommageables et dangereuses, surtout dans cette saison où les bois sont garnis de feuillages et les champs pleins de récoltes;

"Qu’ainsi elles doivent être ajournées jusqu’à la dépouille des bois et des champs, sauf à employer la ressource de l’empoisonnement par la noix vomique quand la terre sera couverte de neige, et à rendre alors la mesure générale dans toutes les communes du ressort, avec prière à MM les préfets des départements voisins de prescrire la même mesure et à son excellence le ministre de l’Intérieur (Montalivet) à les y inviter;

"Qu’en attendant, il n’est d’autre moyen de garantir les gardiens de bestiaux et les enfants de la campagne d’être dévorés qu’en défendant le parcours isolément, et en ordonnant que le bétail d’une commune ou d’un village sera confié à la garde d’un ou de plusieurs pâtres communs, âgés au moins de 20 ans, lesquels seront munis d’armes ou d’autres défenses ; et en faisant défense d’envoyer dans les champs des enfants ou domestiques en bas âge, isolément, sans être accompagnés de quelqu’un en état de les défendre;

"Par ces motifs, arrêté:

  • Art. Premier.
    Les battues sont ajournées jusqu’à la dépouille des bois et des champs.
  • Art. 2.
    Il sera disposé dans les bois l’hiver prochain, lorsque la terre sera couverte de neige, par l’ordre des maires et par les soins des gardes forestiers et champêtres, des appâts saupoudrés de noix vomique pour attirer les loups et les empoisonner.
  • Art. 3.
    Cette mesure sera prise simultanément dans toutes les communes. Le préfet indiquera l’époque et la durée par un avertissement public qui sera adressé à toutes les communes.
  • Art. 4.
    Le parcours à proie séparée est interdit.
  • Art. 5.
    La garde du bétail sera désormais confiée à un ou plusieurs pâtres communs, âgées au moins de 20 ans, qui seront munis d’armes ou d’autres défenses.
  • Art. 6.
    Il est interdit d’envoyer dans les champs des enfants ou domestiques en bas âge isolément sans être accompagnés de quelqu’un en état de les défendre.
  • Art. 7.
    Les maires tiendront la main à l’exécution du présent arrêté, feront constater les contraventions par des procès-verbaux. Elles seront poursuivies, à leur diligence, en police rurale et municipale, et le préfet en sera informé par l’intermédiaire des sous-préfets.
  • Art. 8.
    Le présent arrêté sera imprimé et publié dans toutes les communes, lu à l’issue de la messe de paroisse. Il en sera adressé une ampliation à son Excellence le ministre de l’Intérieur, avec prière de l’approuver, et exécuté par provision vu l’urgence.

"Fait à Vesoul, en l’hôtel de la préfecture, le 3 juillet 1813. Le baron, préfet, signé : Hilaire.
"Pour ampliation : à Son Excellence Monseigneur le ministre de l’Intérieur. Le Baron Préfet."