Mort de Canelle: Extrait de l'arrêt de la Chambre de l'Instruction avril 2007

Logo Facebook
Vous êtes ici: Accueil > Faune-Pyrenees > ours > Ours-Baptise > Canelle > Ours-Mort-Cannelle-Chambre-Instruction-Cour-Appel-Pau

Présentation d'un extrait de l'arrêt de la Chambre de l'Instruction de la Cours d'Appel de Pau du 6 avril 2007

- Extrait de l'Arrêt du 6 avril 2007

[...] Attendu qu'il résulte de l'information les faits suivants:

Le 30 octobre 2004 Gérard Caussimont, président du Fonds d'Intervention Eco Pastoral Groupe Ours Pyrénées (FIEP) accompagné de deux autres membres du réseau ours brun et d'une quatrième personne, s'était rendu dans le secteur d'Urdos-Sauquet-La Gaube-Bendous-Rouglan afin de localiser l'ourse Cannelle et son ourson qui n'avaient pas été repérés depuis le 19 octobre. Les quatre hommes avaient rencontré Francis Claverie près du sentier Larry-La Gaube, l'avaient informé de la présence probable des deux ursidés et lui avaient demandé de ne pas chasser dans le secteur. Gérard Caussimont expliquera plus tard aux gendarmes qu'il pensait que l'ourse était partie dès lors que le berger dont l'animal suivait les brebis avait quitté l'estive le jeudi précédent et que lui et ses amis avaient attendu suffisamment. Le témoin évoquera un échange "vif".

Quelques heures plus tard Gérard Caussimont et ses compagnons découvraient des traces fraiches de l'ourse et de son petit datant de moins de 48 heures dans le secteur du col du Couret-Pas de l'ours. L'information était aussitôt transmise dans la journée à Jean-Jacques Camarra, le coordinateur du réseau ours brun qui la diffusait à Didier Herve, directeur de l'Institut Patrimonial Haut-Béarn, lequel contactait ensuite Fernand Esterez, secrétaire général de la fédération des chasseurs puis les présidents des Acca d'Etsaut et d'Urdos, ce dernier Bernard Claverie recevant l'information le 31 octobre vers 20 H 30.

Quelques heures plus tard soit le 1er novembre 2004 en début de matinée six chasseurs, membres de l'association de chasse Acca d'Urdos: René Marqueze -retraité de l'équipement- Alain Bonnemazou -agent d'entretien- Francis Claverie -surveillant de nuit- Joseph Hosta -gérant d'entreprise- André Cedet -agent de travaux à la DDE- et Bernard Claverie -retraité France Télécom- se retrouvaient pour participer à une chasse au chevreuil et au sanglier au dessus du village d'Urdos dans le secteur dit de "la deux" en bas du Rouglan.

Au point de rencontre de la cabane du Rouglan avant que la chasse ne débute, Bernard Claverie recommandait la prudence à ses compagnons et les informait de la découverte des traces récentes d'ours dans le secteur signalé par Didier Herve.

En fin de matinée, après avoir abattu un chevreuil, les chasseurs déjeunaient puis ils décidaient de poursuivre la chasse dans le secteur de "la deux".

Francis Claverie, accompagné de ses six chiens plongeait dans les bois situés sous la cabane de Rouglan pour prendre le chemin du Fort puis remonter vers le col du Couret.

Alain Bonnemazou se postait sur le plateau de la cabane du Rouglan, en bordure de l'entrée du bois où venait d'entrer le traqueur. Les quatre autres chasseurs remontaient les crêtes du chemin du Bendous.

Francis Claverie attendait quelques minutes pour permettre à ses compagnons de prendre leurs postes. Puis il découplait les chiens pour démarrer la battue. A peine lâché, le plus jeune des chiens, appartenant à René Marqueze, faisait demi-tour et suivait la trace de son maître pour le rejoindre.

Francis Claverie laissait chasser les chiens lorsque, à un moment, leurs aboiements caractéristiques lui faisaient penser qu'ils avaient débusqué un sanglier. Il s'approchait et voyait soudain les chiens revenir vers lui poursuivis par un ours. Le chasseur poussait un cri pour effrayer l'animal qui se dressait alors en grognant et accrochait l'un des chiens.

Francis Claverie tirait alors un coup de feu en l'air pour le faire lâcher prise. L'ours lâchait le chien et s'éloignait. Mais quelques instants plus tard, l'animal réapparaissait et le chasseur l'entendait venir vers lui en soufflant. Il lui jetait son vêtement et le mettait en joue. L'ours s'étant arrêté dans sa charge, il renonçait à tirer sur lui et tirait un second coup de feu en l'air. L'animal faisait une nouvelle fois demi-tour.

Francis Claverie quittait immédiatement les lieux et allait prévenir ses compagnons afin de faire cesser la chasse. Dépourvu de moyens de communication, il criait en vain à l'adresse d'Alain Bonnemazou qu'il finissait par rejoindre. Il laissait ce dernier à la cabane de Rouglan gardant chiens et sacs et remontait le sentier menant au col de Couret pour chercher les autres.

Il trouvait en chemin Bernard Claverie, Joseph Husta et André Cedet qui avaient entendu le cri et les coups de fusil. René Marqueze à son poste les avait aussi entendus. Il devait déclarer plus tard qu'il pensait, bien que le cri fût "vilain" (sic) qu'un sanglier avait été débusqué.

Quelques instants après, il voyait passer quelque chose prêt de l'étroit couloir où il se trouvait. Il s'approchait pour mieux distinguer et apercevait soudain l'ourse qui remontait le couloir dans sa direction, précédée de son petit.

Le chasseur se repliait promptement suivi de Cannelle. Il reculait ainsi que son chien en direction de la falaise. A un moment, Cannelle repartait et disparaissait de sa vue. Mais il la voyait bientôt revenir quelques brefs instants plus tard, cette fois par la droite, grognant et soufflant. Puis elle refaisait demi-tour. René Marqueze indiquait qu'il avait profité de cet instant pour continuer son repli, prenant un passage le long de la falaise, vers le précipice situé en contrebas.

A ce moment l'homme chutait avec son chien, perdant casquette et fusil. Il était retenu en contrebas par un massif de ronces sur une minuscule terrasse. Les investigations menées ultérieurement permettront de trouver les traces laissées sur la flore par la chute de René Marqueze à l'endroit indiqué par celui-ci.

Il tentait sans résultat de joindre par téléphone Joseph Husta mais parvenait à récupérer son fusil, René Marqueze déclarait tout au long de l'enquête qu'il avait attendu pendant 40 à 45 minutes le départ de l'ourse. Il la voyait par intermittence, quelques mètres au-dessus de lui, à son aplomb, qui apparaissait puis disparaissait puis réapparaissait encore. Il avait le sentiment disait-il qu'elle le "gardait".

C'est finalement Joseph Husta qui allait parvenir à joindre René Marqueze au téléphone tandis qu'avec Francis et Bernard Claverie ils remontaient dans sa direction. Joseph Husta lui indiquait qu'ils se portaient à son secours.

Après avoir attendu encore quelques instants, René Marqueze, s'étant convaincu que l'animal qu'il ne voyait et n'entendait plus était parti, avait entrepris de s'extraire du précipice et de remonter vers ses amis. Dans une prudente progression, il avait contourné le chemin aller au niveau du massif montagneux un peu avant le Pas de l'ours.

Cependant, après quelques dizaines de mètres parcourus sur une zone fortement pentue, René Marqueze se retrouvait à nouveau confronté à Cannelle qui arrivait par sa gauche. Le chasseur tentait de fuir en allongeant le pas mais il entendait l'animal le charger derrière lui en soufflant bruyamment. Entendant le pas de charge se rapprocher, il se retournait et faisait feu aussitôt au jugé, l'arme à la hanche. Cannelle s'effondrait dans la pente.

Les trois autres chasseurs entendaient le coup de feu. Aussitôt Joseph Husta appelait et entendait René Marqueze en pleurs lui dire qu'il venait de tuer l'ours. Quelques instants plus tard ses amis le retrouvaient assis sur un caillou. Les constatations sur place, les données balistiques et médico-légales ne Contre disaient pas cette relation des faits.

Le 7 décembre 2004, René Marqueze était mis en examen du chef de destruction d'une espèce animale protégée.

Les motifs

Attendu que dès sa première audition René Marqueze a spontanément et explicitement reconnu avoir volontairement tiré avec son fusil sur l'ourse Cannelle ; qu'il est avéré, et cela n'est pas discuté, que ce tir est à l'origine de la mort de l'ursidé; qu'en conséquence le délit de destruction d'espèce animale protégée est établi et justifiait le renvoi de René Marqueze devant le Tribunal Correctionnel; qu'en effet l'invocation par le mis en examen du bénéfice d'un fait justificatif - l'état de nécessité- constitue un moyen de défense qui ne peut être abordé qu'une fois dûment établie la responsabilité pénale du prévenu du chef du délit reproché, que seule la juridiction du jugement statuant au fond dispose du pouvoir d'affirmer cette responsabilité, qui est le préalable obligatoire à l'examen de la question relative au fait justificatif invoqué;

Attendu que toute autre façon de procéder porterait atteinte à l'article préliminaire du code de procédure pénale qui pose le principe fondamental selon lequel la procédure pénale doit garantir la séparation des autorités chargées de l'action publique et des autorités de jugement;

Attendu que le rôle de la Chambre de l'instruction se limite à dire s'il résulte des pièces du dossier des charges imputables au mis en examen d'avoir commis les faits reprochés et à apprécier si celles-ci suffisent à justifiez son renvoi devant la juridiction de jugement;

Attendu qu'en l'espèce il résulte incontestablement des pièces du dossier des charges suffisantes permettant le renvoi de René Marqueze devant le Tribunal Correctionnel afin d'y répondre du délit de destruction d'espèce animale protégée;

Attendu cependant que la loi fait obligation à la Chambre de l'instruction de répondre à tous les arguments de fait et de droit développés par les parties dans leurs mémoires; que c'est donc à ce seul titre que les considérations suivantes prennent leur place;

Attendu que le fait justificatif invoqué par la défense et retenu par le magistrat instructeur, tiré de l'état de nécessité, est prévu par l'article 122-7 du code pénal, lequel dispose que n'est pas pénalement responsable la personne qui, face à un danger actuel ou imminent qui menace elle même, autrui ou un bien, accomplit un acte nécessaire à la sauvegarde de la personne ou du bien sauf s'il y a disproportion entre les moyens employés et la gravité de la menace;

Qu'en l'espèce, l'état de nécessité se définit pour René Marqueze comme la situation impérieuse dans laquelle il s'est trouvé d'accomplir un acte défendu par la loi pénale pour sauvegarder son intégrité physique;

Que l'appréciation de ce danger grave, actuel ou imminent ne s'effectue pas "In Concreto" et ne prend pas en considération la plus ou moins grande émotivité de l'auteur du délit ou des éléments propres à sa personnalité ou à la singularité de ses traits de caractère, tous éléments subjectifs qui ont pu lui donner une vision des événements par lui vécus peu conforme à la réalité; que cette analyse doit être faite "In ABbstracto" c'est à dire par référence au comportement habituel ou ordinaire d'un chasseur normalement expérimenté placé dans des conditions identiques;

Attendu qu'en l'espèce il appartient à René Marqueze, qui revendique le bénéfice de ce fait justificatif, de démontrer la réunion de trois éléments:

Attendu qu'il résulte des pièces du dossier que René Marqueze est totalement défaillant dans l'administration qui lui incombe, de la preuve d'un seul de ces trois éléments;

Attendu qu'il n'est pas contesté que René Marqueze, né à Urdos, est un chasseur très expérimenté puisqu'ayant commencé à chasser à l'âge de 16 ans, il comptait, au jour des faits, 45 années d'expérience cynégétique en surplus dans le domaine des gros gibiers, isards, chevreuils et sangliers;

Qu'il résulte des pièces mêmes du dossier et des différents ouvrages versés à la procédure consacrés à l'étude comportementale de l'ours pyrénéen, qu'aucune archive, aucun article ou texte ne rapporte un fait au cours duquel un ours des Pyrénées aurait tué ou gravement blessé un homme; que ce fait n'est contredit par aucun témoignage;

Qu'au surplus, la littérature en la matière mais surtout des études sérieuses dont des conclusions figurent au dossier attestent que lorsqu'un ours est confronté à un être humain, dans 97 % des cas il s'éloigne tranquillement ou marque son indifférence en poursuivant son activité et que ce n'est que dans 3 % des cas qu'il procédera une charge dite dissuasive de diversion dans le seul but d'éloigner l'homme de sa progéniture;

Que les pièces de l'information confirment l'innocuité de ce comportement maternel;

Que c'est ainsi que Francis Claverie - un des participants à la battue aux chevreuils et aux sangliers- subira deux charges d'intimidation de l'ourse "Cannelle" qui voulait protéger son ourson contre les attaques des chiens; qu'il interrompra aisément la première en tirant un coup de feu en l'air et qu'il mettra fin à la seconde en se Contentant de jeter un vêtement en direction de l'animal puis en tirant un nouveau coup de fusil en l'air; que l'absence de dangerosité de ces "charges" est confirmée par les deux égratignures de 1cm et 0,5cm de long présentées par le postérieur du petit chien du chasseur qui s'était pourtant retrouvé quelques instants entre les pattes de "Cannelle";

Qu'en outre un second exemple, tout aussi édifiant, figure au dossier et résulte de la mésaventure vécue par Philippe Souberbie (D 179) qui chassant le 22 septembre 2004 dans le vallon de Bitet s'est inopinément retrouvé face à une ourse - certainement Cannelle - et à son ourson lequel prenait aussitôt la fuite pendant que sa mère se précipitait sur le chasseur, le renversait sur le dos et se penchait sur lui; que Philippe Souberbie s'apprêtait alors à faire feu lorsqu'il a eu la surprise de voir le plantigrade se redresser, faire demi-tour et s'enfoncer définitivement dans un bois à la suite de sa progéniture;

Attendu que René Marqueze qui, à l'instar de ses compagnons de chasse, reconnait que la présence de "Cannelle" était habituelle depuis des années sur le territoire de chasse de la commune d'Urdos - l'un d'entre eux évoquera même une véritable cohabitation - qui admettra avoir déjà rencontré à deux reprises l'ursidé, ne pouvait pas ignorer son peu de dangerosité ni l'existence de moyens simples et efficaces pour l'éloigner; qu'il n'est pas sans intérêt de relever que "Cannelle" était une petite ourse des Pyrénées pesant 70 kg et mesurant dressée sur ses pattes: 1,70m;

Attendu en conséquence que faute pour lui de démontrer la réalité d'un danger pour son intégrité physique René Marqueze ne peut invoquer un quelconque état de nécessité qui pourrait justifier le délit qui lui est reproché;

Attendu, à titre surabondant, qu'il convient de dire qu'il ne pourrait non plus s'en prévaloir en raison des fautes suivantes par lui commises:

Attendu que l'existence d'une seule de ses fautes interdirait à René Marqueze d'invoquer l'état de nécessité mais qu'il convient de relever que celui-ci a cumulé ces trois manquements directement à l'origine de la réalisation du dommage;

Attendu qu'il résulte clairement des pièces du dossier que le 30 octobre Gérard Caussimont, président du fonds d'intervention éco pastoral du groupe ours Pyrénées(FIEP), avait expressément demandé à Francis Claverie de ne pas chasser dans le périmètre des territoires d'Urdos - Bendous - Rouglan du fait de la présence de l'ourse "Cannelle" et de son ourson dans ce secteur; qu'au surplus, le 31 octobre à 20 H 30, Bernard Claverie, président de l'association de chasse de la commune d'Urdos, a été dûment informé par Didier Herve -directeur de l'institution patrimoniale du Béarn- de l'existence de traces de "Cannelle" et de Son ourson remontant à 48 heures, situées "en dessous du col de Bendous";

Attendu que malgré cet avertissement et cette information, à peine 12 heures plus tard, Bernard Claverie et cinq chasseurs de son association -dont René Marqueze- décidaient "d'organiser" une battue aux chevreuils et aux sangliers appuyée par six chiens; que la connaissance qu'avaient tous les chasseurs de la présence de Cannelle et de son ourson résulte explicitement de leurs déclarations et des propos tenus par le président de l'association de chasse qui déclarera aux enquêteurs:

"J'avais donné comme consigne de chasse un identification stricte des SECTEUR. J'étais informé que Gérard Caussimont avait observé des traces d'ours le samedi ... Nous savions, le lundi qu'une trace ou indice d'ours avait été relevée dans le secteur du Bendous"; que les cinq autres chasseurs ont confirmé avoir entendu les propos ainsi tenus par le président;

Attendu que pour se défendre, les chasseurs notamment le président de l'association mais aussi René Marqueze vont discuter sur le lieu désigné par Gérard Caussimont comme portant des traces de l'ourse et de son ourson arguant que le secteur sur lequel ils chassaient n'était pas celui indiqué par le responsable du suivi de l'ours, mais était situé en contre bas; que cet argument est inopérant et dénué de sens dès lors qu'il apparait, d'une part:

Attendu en outre que les chasseurs et en particulier René Marqueze ont aussi déclaré qu'ils savaient que "Cannelle" était présente sous le col du Bendous lorsque le berger Zamponi et ses 5OO brebis étaient stationnées aux estives de Bendous puisque, selon eux, l'ourse prélevait chaque aunée quelques brebis pour sa nourriture; que René MAROUEZE a expliqué que de manière générale chaque automne ils attendaient une huitaine de jours après le départ du troupeau pour aller chasser sur ce secteur, persuadés que l'ourse avait suivi les brebis et quitté définitivement les lieux;

Qu'il résulte des pièces du dossier que le berger Zamponi a quitté les estives du Bendous le jeudi 28 octobre et que, contrairement aux années précédentes, 3 jours seulement après ce départ les chasseurs d'Urdos effectuaient une battue dans ce secteur et ce au mépris des avertissements et informations sur la présence d'une ourse suivie de son ourson; que dès lors il convient de constater que les chasseurs, dont René Marqueze, n'ont pas respecté le délai qu'ils s'imposaient eux mêmes habituellement;

Qu'au surplus, aucun d'entre eux ne pouvait ignorer que dans la zone de la battue se trouve une importante forêt de hêtres, arbres qui à l'automne produisent des faines en abondance dont l'ours est particulièrement friand et qui constituent une part importante de son alimentation;

Qu'incontestablement René Marqueze, né à Urdos, chasseur chevronné qui a été pendant 10 ans le président de l'association de chasse de la commune d'Urdos et qui avait remis son mandat 50 jours avant les faits, n'a tenu aucun compte de l'ensemble des éléments susvisés et a pris sciemment le risque d'une confrontation avec l'ourse; qu'il a ainsi manifestement contribué à créer la situation ayant permis la réalisation du dommage;

Attendu par ailleurs que les conditions matérielles dans lesquelles la battue aux chevreuils et aux sangliers a été organisée méritent d'être examinées; qu'il est notoire qu'une battue au gros gibier est une pratique cynégétique extrêmement dangereuse en raison de la puissance des munitions utilisées et du caractère collectif de la chasse; que dès lors son organisation doit être rigoureuse et respecter certaines prescriptions réglementaires;

Qu'en l'espèce il résulte des déclarations des chasseurs que la battue du 1er novembre 2004 concernait à la fois les chevreuils et les sangliers; que d'ailleurs au cours de la journée le seul animal tué sera un chevreuil; que par ailleurs les chasseurs - en particulier René Marqueze - disposaient de fusils à deux canons dont l'un était alimenté par une balle destinée aux sangliers et l'autre contenait une balle réservée aux chevreuils;

Qu'au mépris de la réglementation en vigueur aucun plan de chasse n'a été préalablement établi et déposé; qu'aucune consigne n'a été donnée par l'organisateur de la battue aux chasseurs concernant les angles de direction de tirs et surtout qu'aucun des participants et plus particulièrement le chef de battue ne possédaient de trompe, de corne ou de sifflet afin de donner le départ de la battue et de l'interrompre en cas d'accidents ou de danger; qu'il s'agit là d'autant de contraventions commises par les chasseurs dont une est particulièrement dommageable - le défaut de signal sonore - puisque si cette prescription avait été respectée elle aurait permis de mettre un terme à la battue dès l'instant où Francis Claverie s'est trouvé confronté à l'ourse "Cannelle"; qu'il est certain que si René Marqueze avait entendu le signal de la fin de la battue, quitté son poste et rejoint ses camarades, il n'aurait pas rencontré l'ourse et son ourson; qu'il appartenait à chacun des chasseurs de ne pas participer à une battue dangereuse, organisée en contravention des prescriptions réglementaires applicables en la matière; que placé face à ses manquements graves le président de l'association admettra devant le Juge d'instruction qu'ils ne disposaient d'aucune trompe ou autre équipement sonore, promettra qu'ils allaient tous acheter une trompe mais décrétera in fine que de toutes façons, tout cela n'est pas "très utiles";

Qu'une telle inconséquence apparaît regrettable de la part du président d'une association de chasse et de chasseurs qui n'hésiteront pas à lâcher six chiens - dont l'un dit "le lunatique" totalement inexpérimenté - dans un secteur fréquenté par "Cannelle" et son ourson;

Attendu par ailleurs qu'il résulte de l''information et des propres déclarations de René Marqueze que celui-ci est resté pendant 40 à 45 minutes au fond d'un ravin "gardé" selon son expression par l'ourse et qu'il a quitté cet endroit où il était malgré tout en sécurité pour remonter la pente et se rapprocher de l'animal; que ce comportement est surprenant à un double titre, d'une part, parce qu'il ne correspond pas à l'attitude d'une personne en proie à la frayeur dont il excipe, d'autre part, parce que René Marqueze savait que ses compagnons étaient à proximité et se portaient à son secours; qu'il est, en effet, établi que ces derniers se trouvaient non loin lors du coup de feu fatal puisque notamment Bernard Claverie dira avoir perçu le bruit de la chute du corps de "Cannelle" dans le ravin; qu'ainsi René Marqueze a eu un comportement personnel fautif ayant participé à la réalisation du dommage puisqu'il lui suffisait d'attendre encore quelques instants seulement pour éviter la confrontation ultime avec l'ourse;

Attendu que l'ensemble des fautes ainsi commises par René Marqueze s'opposent à l'application des dispositions de l'article 122-7 du code pénal relatives à l'état de nécessité.

Par ces motifs:

La Chambre de l'Instruction de la Cour d'Appel de Pau

Vu les articles 186, 194 et suivants du code de procédure pénale,

En la forme: Déclare les appels interjetés recevables.

Au fond: Infirme l'ordonnance déférée et statuant à nouveau,

Renvoi René Marqueze devant le Tribunal Correctionnel de Pau pour avoir le 1er novembre 2004 à Urdos (Pyrénées-Atlantiques) détruit une espèce animale protégée en l'espèce l'ourse "Cannelle"

Faits prévus et punis par les articles L411-1. L.4l5-3, L 415-4, du code de l'environnement.

Ordonne que le présent arrêt soit exécuté à la diligence de Monsieur le Procureur Général

Le Président M. Treilles

- De la notion de cohabitation

A la lecture de ces attendus, il va falloir se pencher sur la définition de cohabitation. En effet, à la lecture de cette analyse juridique des faits par la Chambre de l'instruction, il apparaît que la chasse est aussi impossible.Nous nous dirigeons donc vers un partage des territoires des zones autorisées et des zones interdites de fait ou de droit aux activités humaines.
L' utilisation du mot "cohabitation" en politique a modifié son sens. mais les interprétations juridiques, l'aplication des lois et réglements et l'acharnement idéologique d'une poignée d'écologistes en change totalement le sens par rapport à la notion historique du terme qui, d'ailleurs, n'en interdisait pas la destruction.

- Observations diverses

Il serait intéressant de connaître la nature de ces études et la manière dont elles ont été menées et par qui? Curieusement, elles ne semblent pas publiques.