Des crocs dans la montagne... Les estives trop exposées au loup sont abandonnées. Une menace pour la biodiversité

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Dans son numéro 3856 du 6 au 12 août 2013, le magazine Le Terre / Les campagnes en mouvement, fait le point sur une partie des aspects de la problématique du loup dans les massifs montagneux en zone de pastoralisme notamment ovin. Après avoir abordé les insuffisances du Plan loup, le stress des éleveurs, la polémique sur les chiens en divagation, l'unanimité syndicale, la disparition de l'élevage local.... C'est le recul de la biodiversité qui est mis en avant... "La bonne gestion des alpages est perturbée par la présence du loup. Cela pousse au surpâturage des zones les plus sûres d’un côté et à l’abandon des celles réputées dangereuses de l’autre".

«Le loup est un animal invisible. C’est très angoissant pour les bergers », lance Olivier Bel, éleveur en Provence-Alpes-Côte-d’Azur, qui emmène pâturer ses brebis dans les alpages de HauteSavoie. Quand nous l’avons contacté, son élevage venait de subir des attaques de loup la semaine précédente. Le plan Loup 2013-2017, signé en mai 2013 par les ministres de l’Agriculture et de l’Ecologie, est un leurre pour une bonne partie des éleveurs dont Olivier Bel, qui est membre de la Confédération paysanne.

Couverture La Terre
A lire.....

Un plan insuffisant

Ce "Plan d’action national loup" prévoit le prélèvement de 24 loups par an. «C’est insuffisant, car ce plafond garantit avant tout l’augmentation de la population de loups à terme», analyse le syndicat paysan. Des bergers sont déjà descendus définitivement des herbes grasses des alpages pour parquer leurs brebis dans des bâtiments hors-sol, car les pertes étaient trop importantes et les coûts de production en constante augmentation. La présence du loup demande une vigilance de chaque instant et le travail à fournir augmente: il faut regrouper ses bêtes tous les jours, financer un permis de chasse et subir les pertes de brebis tuées, blessées ou perdues, auxquelles il faut ajouter celles qui ne peuvent pas mettre bas à cause du stress engendré....... A lire...

- «Le loup va faire disparaître l’élevage local»

Un entretien avec Laurent Garde...

«Le loup est un instrument pour éliminer l’élevage local, dans le projet de faire des Alpes, et sans doute aussi des Pyrénées, un grand massif ensauvagé. » .... « Le loup nous ramène au Moyen-Âge, à une époque où la main d’oeuvre ne coûtait rien et n’avait aucune protection sociale. »... A lire...

- L'Actualité juridique

Les animaux sauvages mais aussi domestiques, ça peut faire des dégâts aux troupeaux, aux cultures, aux automobiles ! Ce pose alors la question de l’indemnisation. Voici les réponses à commencer par le cas des loups, des ours et des chiens errants.

- L’indemnisation des troupeaux

Chaque année, à l’heure où les troupeaux de moutons et de chèvres sont dans les estives, les attaques des loups défraient la chronique et la colère légitime des éleveurs. Celles commises par les chiens « errants » fait moins de bruit bien qu’elles soient une réalité. Certes le loup et l’agneau ne peuvent pas cohabiter malgré un «plan loup» avec son arsenal d’aides financières, techniques, canines (Patou) et l’autorisation de prélèvements par tir de plus en plus important. Le chien et l’agneau ne peuvent non plus cohabiter surtout qu’aucun plan n’est prévu à ce sujet et pour cause. C’est au propriétaire du chien ou à celui qui en a la garde de faire en sorte qu’il ne soit pas en état de divagation (article L211-23 du code rural commenté ci-contre). Il est donc clair que dans le cas du loup, l’etat est responsable, dans le cas du chien « errant » c’est le propriétaire qui est responsable. Le loup comme l’ours sont des animaux sauvages qui n’appartiennent donc à personne (res nullius). L’etat ayant pris la responsabilité politique de les protéger, il doit juridiquement assumer..... A lire....

- Les chiens en état de divagation...

En France on recense peu de chiens errants, sous-entendu sans maître. En fait ce qu’on nomme ainsi ce sont des chiens divagants qui ont donc bien un maître ou un gardien et se sont échappés ou n’ont pas été tenus en laisse. Or est considéré comme en état de divagation tout chien, qui:

- Le cas du loup

Nous ne nous étendrons pas sur le statut du loup et les moyens de prévention et de lutte pour « prévenir » ses dommages. Cela a fait l’objet de nombreux articles dans La Terre, le dernier datant du 3 juin 2013. rappelons tout de même que le loup ne fait pas partie de la liste des animaux nuisibles comme son compère renard (arrêté du 2 août 2012). Ce qui permettrait aux préfets de ne pas attendre le feu vert de l’etat pour prendre des arrêtés de destruction par tir ou piégeage dès que l’animal cause des dommages importants aux activités agricoles notamment les élevages ovins-caprins. Il ne fait plus partie de la liste
Il ne fait plus partie de la liste des animaux protégés menacés d’extinction en France (arrêté du 9 juillet 1999). Il en a été retiré par arrêté du 27 du mai 2009. Mais il demeure un animal protégé en France par arrêté du 23 avril 2007 du ministère de l’écologie consolidé le 7 octobre 2012. Ce qui interdit sa destruction sauf dérogation ministérielle autorisant un certain nombre de prélèvements par tir. (24 pour la campagne 2013-14)..... A lire

- «Le loup va faire disparaître l’élevage local» - Un entretien avec Laurent Garde...

Coordinateur régional du Cerpam (Centre d’études et de réalisations pastorales Alpes Méditerranée), Laurent Garde avait accueilli le loup avec espoir. Aujourd’hui il nous confie son pessimisme.

La Terre: vous dites que le loup menace avant tout les petits élevages. Pourquoi?
Laurent garde: On a appris au fil des années à maîtriser, à peu près, la protection des gros troupeaux regroupés en estive de haute montagne dégagée. Quand on a 2 000 bêtes, un berger, un aide-berger financé à 80 % par la mesure de protection des troupeaux, 3 à 5 chiens de protection et des parcs de regroupement nocturne, le coût relatif n’est pas très élevé. Mais d’une part le loup ne se contente pas de la haute montagne et d’autre part, les éleveurs ne sont pas tous de grands transhumants venus du littoral méditerranéen. Les éleveurs locaux ont un troupeau moyen de 300 à 400 bêtes, 500 à 600 au plus. Ils pratiquent l’allotement: en fonction des dates de mise bas, des logiques commerciales, de l’éclatement du parcellaire, ils n’ont jamais 400 bêtes au même endroit en même temps. Déjà avec un troupeau plus petit, le coût relatif des mesures de protection est plus lourd, mais il faut en plus protéger en même temps plusieurs lots, avec pour chaque lot le même dispositif que pour 2 000 bêtes ! C’est impossible. En plus ces bêtes-là restent à l’alpage six mois, parfois toute l’année : la menace du loup dure plus longtemps, sur un troupeau fractionné… Le résultat c’est qu’aujourd’hui je suis persuadé que le loup va faire disparaître l’élevage local. Et ce n’est pas une position de principe, c’est une conviction que j’ai acquise au fil des ans. Les éleveurs ont toujours été opposés au loup mais nous, organisme technique, nous avons joué le jeu. On ne savait rien – ou plutôt, on savait ce que nous racontaient les défenseurs du loup. Ils nous ont menti de A à Z! Il suffit d’enquêter en Espagne, en Italie, en Roumanie…

Cela fait partie des choses que l’on entend : « en italie ça ne se passe pas si mal »…
Dans les Abruzzes, d’après mes infos, l’élevage ovin a régressé de 80 % en 40 ans. Alors oui, c’est une réussite mais dans le sens où un espace pastoral est en train de muter vers un espace touristique aux portes de Rome… Et ne parlons pas du travail : le Cerpam se bat depuis qu’il existe pour que les bergers aient une convention collective, des conditions de travail et des salaires décents, un statut… Or la réalité en Italie c’est que tous les bergers viennent des Balkans, d’Albanie, de Macédoine, et ils ont des conditions sociales bien loin de ce qu’on a en France. Le loup nous ramène au Moyen-âge, à une époque où la main-d’œuvre ne coûtait rien et n’avait aucune protection sociale. Pour autant les éleveurs italiens que nous rencontrons dans le Piémont vivent la même chose que nous. En Espagne, même chose. Le ministre suédois de l’Ecologie – pas de l’Agriculture: de l’Ecologie! – a demandé, tout comme son collègue espagnol, le déclassement du loup dans la directive Habitat qui le protège. En France on a imposé un mensonge, mais ce mensonge est en train de se fracasser sur la réalité et dans les Alpes du Sud on arrive à des situations de détresse que je n’aurais jamais imaginées. On ne maîtrise plus rien. Depuis 20 ans les éleveurs se protègent massivement, et pendant un temps on a cru qu’on pourrait contenir la prédation. Mais c’est un animal infiniment plus malin que ce qu’on croyait. Il a vu qu’il ne risque rien – rappelons qu’il bénéficie d’une protection absolue – et il a appris à déjouer les moyens de protection, qui ne sont finalement que des obstacles. Pendant 20 ans on l’a éduqué à ne pas craindre les activités humaines. Aujourd’hui des loups attaquent en plein jour, en présence du berger et des chiens. Certains bergers ont même été confrontés à des attitudes menaçantes envers eux.

Que pensez-vous du plan loup 2013-2017?
C’est un début de prise en compte de la réalité. On introduit la possibilité de défendre le troupeau contre le loup en facilitant les conditions de tir sur 24 individus. Mais il y a deux problèmes. D’une part les tirs de loup sont très difficiles à réaliser – les attaques sont brèves, ne se font pas en terrain découvert, les conditions de visibilité ne sont pas forcément bonnes, on n’a pas systématique- ment un fusil sous la main… D’autre part la France a de fortes chances de se retrouver poursuivie au niveau européen si elle applique l’intégralité de ce plan. Je ne suis donc pas optimiste sur sa réussite.