Gyps fauve - Gyps fulvus ou Vautour fauve

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L'auteur, A.E. Brehm, donne une description populaire du règne animal. Il aborde leur caractères, leur moeurs, les chasses, les combats, leur situation en captivité, la domesticité, l'acclimatation, les usages et les produits que peut en tirer l'homme. Nous avons retenu un extrait d'un des ouvrages concernant le Vatour fauve ou gyps fauve pour disposer d'une appréciation de l'homme du 19ème siècle (1878) sur cet animal.

- Caractères

Le gyps fauve est un oiseau de 1m13 de long, sur 2m72 d'envergure; la longueur de l'aile pliée est de 72cent, celle de la queue de 32. Son plumage est d'un brun fauve clair uniforme, le ventre étant plus foncé que le dos. Chaque plume est bordée d'un liseré clair. Les grandes couvertures supérieures de l'aile sont bordées de blanc, ce qui forme une bande claire en travers de l'aile. Les rémiges primaires et les rectrices sont noires; les rémiges secondaires d'un gris brun, bordées en dehors d'un mince liseré fauve; les plumes de la collerette blanches ou d'un blanc jaunâtre. L'oeil est brun clair; la cire gris de plomb foncé; le bec brun de corne; les pattes sont d'un gris brunâtre clair.
Les jeunes oiseaux ont un plumage plus foncé, avec les tiges de plumes plus apparentes. Les plumes de la collerette sont brunes, longues et minces, tandis que, chez l'adulte, elles sont courtes ébarbées et blanches.

- Distribution géographique

Le gys fauve est commun dans la Transylvanie, dans toute la péninsule Hellénique, à partir des Balkans, dans l'est, le sud et le centre de l'Espagne et dans le sud de l'Italie; quelquefois, mais rarement, il s'égare jusqu'en Allemagne. Il est bien plus répandu encore dans toute l'Egypte, dans le nord de la Nubie, dans la principauté de Tunis, en Algérie, au Maroc, et il est également commun dans le nord-ouest de l'Asie. On le trouve dans l'Himalaya; mais il descend rarement dans les plaines de l'Inde, où il est remplacé par deux espèces voisines, les gyps indicus, et gyps bengalicus, qui lui ressemble beaucoup.

- Moeurs, habitudes et régimes

Tous les gyps paraissent habiter les rochers, et ce n'est que là que l'on trouve leurs aires: aussi les rencontre-t-on surtout au voisinage des montagnes escarpées. Jamais je n'ai vu le gyps fauves perché sur un arbre; par contre, le gyps de Ruppell y passe souvent la nuit. D'après ce que j'ai pu observer, les gyps manquent totalement dans l'intérieur des forêts.
Les moeurs des gyps se rapprochent beaucoup de celles des autres vulturidés; toutefois, elles présentent quelques différences importantes. Les gyps se meuvent avec plus de rapidité et d'élégance que les autres vulturidés de l'ancien monde; en s'abattant, surtout, ils déploient presque autant de légèreté qu'un faucon, et change facilement de direction, tandis que les autres se laissent tomber verticalement presque jusque sur le sol.
A terre, ils marchent assez bien pour qu'un homme ait de la peine à les atteindre à la course. De tous les vulturidés, ils sont les plus rusés, les plus colères, les plus violents. Leur intelligence est bornée; les basses qualités, seules, semblent être développées chez eux.
Ils vivent en grandes sociétés, nichent en colonies, et se réunissent souvent à d'autres vautours; mais ils sont toujours les premiers à amener la discorde, et ne tardent pas à dominer les autres espèces. Ils marchent droit sur celui qui les attaque. Blessés, ils se défendent avec rage, se précipitent même sur l'homme, font des bonds d'un demi-mètre de haut, claquent du bec et s'élancent toujours vers la figure de leur adversaire. Quand on les attaques, ils se sauvent d'abord en courant; mais les serre-t-on de trop près, ils se retournent subitement, sifflent comme les hiboux, roulent des yeux furieux.
Est-on parvenu à les saisir, ils se défendent avec leurs serres, et, quelque peu acérées qu'elles soient, elles n'ont font pas moins de blessures dangereuses. Ils ne se comportent pas autrement vis-à-vis de leurs semblables. Il arrive parfois que deux gyps, qui, jusque-là, avaient vécu la paix la plus profonde, qui volaient tranquillement l'un à côté de l'autre, commence un combat, dans l'ardeur duquel ils oublient la hauteur où ils se trouvent.

"Dans une chasse à la Sierra de Guadarrama, dit mon frère, je vis haut, dans les airs, deux gyps fondre tout à coup l'un sur l'autre; ils se saisirent mutuellement, et, incapables de continuer à voler, ils tombèrent à terre en tourillonnant comme une masse inerte. Cela ne refroidit pas leur fureur. Ils continuèrent la lutte, sans se préoccuper de ce qui les environnait. Un berger voulut s'en emparer et tomba dessus avec un bâton. Il leur fallut recevoir plusieurs coups, avant que l'idée leur vint qu'ils feraient bien mieux de s'éloigner et de remettre à plus tard la reprise de leur duel. Ils finirent par se séparer et par se sauver à tire-d'aile, chacun de son côté." Ils ont leur rôle déterminé dans l'attaque d'un cadavre: ce sont eux qui mangent surtout les organes contenues dans les cavités. Quelques coups de bec leur suffisent pour ouvrir dans la paroi abdominale une brèche suffisante pour y entrer leur long cou. On voit, à leurs tressaillements, avec quelle ardeur ils sont à l'oeuvre. Ils avaient les viscères, comme le coeur, le foie, sans sortir la tête de la cavité abdominale; quant aux intestins, ils les tirent hors du corps, puis les coupent d'un coup de bec et les avalent par morceaux. Leur tête et leur cou sont recouverts de sang et de débris, leur aspect est hideux. Je ne sais si, en réalité, ils attaquent les animaux malades ou mourants, comme le condor.
Les Arabes et les bergers des montagnes du sud de la Hongrie leur imputent de pareils méfaits. Ces derniers ont assuré à Lazar que le vautour chauve attaquait et tuaient les moutons égarés.
D'après mes observations, les gyps dorment longtemps pendant le jour. Ce n'est que quelques heures avant midi qu'ils se mettent en chasse, et, vers midi, ils prennent leur nourriture. Lorsqu'ils ont des petits, ils sont tenus à plus d'activité. Lazar, du moins, m'écrit en avoir vu à cette époque, partir peu après le lever du soleil, et parcourir d'abord pendant près d'une heure les alentours du rocher où ils étaient établis. S'élevant ensuite peu à peu, en décrivant des cercles de plus en plus grands, ils finissent par disparaître dans le lointain. Vers midi, ils reviennent, chacun de son côté, se réunissent près de leur colonie, et se remettent à tourner autour de leur rocher. Après cet exercice, ils viennent se poser sur une saillie, sur une arête, et s'y reposent durant quelques heures. Entre deux et trois heures de l'après-midi, ils s'élèvent de nouveau avec grand bruit, tournent quelquefois autour de leur demeure, et repartent pour se mettre en quête de nourriture; mais ils y consacrent moins de temps.
Plusieurs heures avant le coucher du soleil, ils sont déjà de retour à l'endroit où ils ont élu domicile Baldamus, Kruper, Simmpson et mon frère nous ont fait dans ces derniers temps, connaître le mode de reproduction de gyps fauve. Je ne crois pouvoir mieux faire que de citer textuellement le dernier auteur, qui est le plus complet et le plus concis.
Dans le midi de l'Europe, les amours du gyps fulvus ont lieu dans la seconde moitié de février ou au commencement de mars. L'aire est construite dans une crevasse de rocher, ou au-dessus d'une saillie qui la surplombe; elle est formée d'une couche peu épaisse de branches d'un faible volume. La femelle y pond un seul oeuf, gros comme un oeuf d'oie; le mâle le couve le matin, et les premières heures de l'après-midi, la femelle tout le reste de la journée. Jamais le gyps fauve ne niche dans les arbres. Lorsque la place convenable, on y trouve plusieurs aires, distantes l'une de l'autre de cent à deux cents pas. Ces colonies ne sont pas formées exclusivement par des gyps fulvus; on y trouve encore des gypaètes, des aigles de Bonelli, et même des cigognes noires.
Les gyps fauves ne quittent pas volontiers leurs oeufs; il faut un bruit assez fort pour les attirer hors de leurs trous; ils se tiennent alors à l'entrée, regardent de tous côtés, cherchant qui a pu troubler leur repos, et ne s'envolent que quand ils sont bien convaincus du danger. Dans mes chasses aux environs de l'Escurial, je me suis souvent amusé à faire lever des gyps de dessus leurs oeufs. Chaque fois que je criais, ils apparaissaient, regardaient de tous côtés, et ne pouvant m'apercevoir, rentraient dans leur nid. Un coup de feu les faisait tous fuir en grande hâte; et il fallait attendre longtemps pour les voir revenir: ce n'était qu'au bout d'une demi-heure qu'ils apparaissaient de nouveau, l'un après l'autre. Chacun visitait les alentours de son nid, puis venait se percher sur le rocher, regardait encore de tous les côtés, et disparaissait enfin au fond de sa crevasse. On a souvent dit et répété que ces vulturidés attaquaient courageusement le chasseur qui voulait s'emparer de leurs petits; cette assertion est complètement dénuées de fondement.
On ignore encore quelle est la durée de l'incubation; on sait seulement qu'à la fin de mars les petits sont éclos. Jamais ces oiseaux n'exhalent une odeur bien agréable. Déjà leur oeuf, tout frais pondu, a une odeur de musc si épouvantable qu'il faut être un naturaliste passionné pour avoir le courage de vider un de ces oeufs, encore ne le fait-on pas toujours sans dégoût.
Les petits ressemblent dans les premiers temps à un paquet de laine; ils les nourrissent avec beaucoup de tendresse; ils les nourrissent d'abord avec de la viande complètement putréfiée, puis ils leur donnent des aliments plus solides, mais provenant toujours de la même source.
Un pareil régime n'est guère propre, on le comprend, à faire disparaître la puanteur innée de ces oiseaux. Grâce à la quantité énorme d'aliments qu'ils avalent, les jeunes croissent très rapidement; ce n'est toutefois qu'à trois mois qu'ils peuvent prendre leur essor.

- Captivité

Baldamus eut un gyps fauve qui avait été dans le nid; sa taille était celle d'un grand coq; il était recouvert d'un duvet épais et laineux, d'un blanc sale, il exhalait; surtout par les narines, une odeur repoussante, et était d'une voracité extrême. A peine capturé, il mangea deux grives et un coucou, le lendemain, un milan, une carpe de moyenne taille et les intestins de plusieurs oiseaux. Trois semaines après, c'est à peine si l'on pouvait le rassasier. En vingt-quatre heures, il engloutit les viscères de deux veaux, et avala tout ce qu'il put trouver, même du bois et de la terre : les passagers du bateau à vapeur, de leur côté, lui, fournirent ainsi quelques aliments. Lui donnait-on un animal entier, il cherchait toujours à lui ouvrir d'abord le ventre. Plus tard, il ne toucha au reste d'un cadavre, avant d'en avoir complètement vidé l'abdomen.
Sa voracité était telle, dit Baldamus, que quand il me voyait entrer dans son étale sans rien lui apporter, il se mettait à crier, à secouer la tête, se précipitait sur moi, me mordait les pieds et les vêtements. Il apprit bientôt à me distinguer des autres personnes. Un gyps fauve apprivoisé est une chose tout à fait exceptionnelle; d'ordinaire, il reste méfiant et méchant, même avec son maître. ce n'est pas trop s'avancer, dit mon frère, que de dire qu'il demeure toujours jusqu'à un certain point dangereux. Une seule fois, j'ai vu un gyps réellement apprivoisé; c'était dans une auberge, à Bayonne; encore était-il attaché par une chaine, qui gênait considérablement ses mouvements. Cet oiseau arrivait à l'appel de son maître, s'approchait de lui, se laissait prendre et caresser à la tête, au cou et au dos. Il vivait en très bons rapports avec les chiens de l'auberge.
Lazar dit que le gyps fauve est faux et maussade: il le compare volontiers aux mélancoliques méchants. Il n'en a jamais vu que deux qui fussent apprivoisés. L'un d'eux suivait son maître comme un chien; il entreprenait parfois de petites excursions, qui duraient un ou deux jours, puis revenait. Le second appartenait à un boucher, qui le conserva plusieurs années. Il vivait en parfaite amitié avec un vieux chien. Lorsque celui-ci mourut, on jeta son cadavre au rapace, mais, quoique affamé, il ne toucha pas à son ancien ami; il devint triste, refusa toute nourriture, et mourut huit jours après le chien.

- Usage et produits

En égypte, les plumes du gyps fauves sont employées à divers usages. Les pennes des ailes et de la queue servent, notamment, de parures et entrent dans la confection de divers ustensiles. Dans l'île de Crète et en Arabie, on vend, dit-on, les peaux de vautour aux pelletiers, pour en faire des fourrures; les seigneurs arabes et turcs, d'après Belon, payaient ces fourrures excessivement chères. Aujourd'hui, on ne parait plus connaître cet usage en égypte; du moins, n'en ai-je jamais entendu parler.

Source extrait: A.E. Brehm, l'homme et les animaux, les oiseaux, J.B. Baillière et fils Paris 1878.

- Commentaire

Nous pouvons noter qu'en 1878 la connaissance du gyps fauve est limitée à des observations simples et populaires. Parmi ces observations nous retiendrons deux points :

1- la distribution géographique : il n'est pas fait état du nord de l'Espagne ni des Pyrénées. La présence du vautour fauve dans nos régions pyrénéennes serait-elle récente ?

2- .....Leur tête et leur cou sont recouverts de sang et de débris, leur aspect est hideux. Je ne sais si, en réalité, ils attaquent les animaux malades ou mourants, comme le condor.
Les Arabes et les bergers des montagnes du sud de la Hongrie leur imputent de pareils méfaits. Ces derniers ont assuré à Lazar que le vautour chauve attaquait et tuaient les moutons égarés.
Sur ce point il y une interrogation mais déjà de possibles témoignages d'attaques d'animaux vivants. Ce ne serait donc pas aussi nouveau que ce qu'on veut bien nous expliquer.

Où est la vérité?