Nicolino voudrait 250 ours dans les Pyrénées

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Un rapport d’experts dont certains sont de vrais militants idéologiques et n’augure nullement une indépendance scientifique et Fabrice Nicolino part dans un délire intellectuel. Il se prend à rêver d’espaces sauvage avec des ours sans grand souci pour les femmes et les hommes qui vivent sur ces territoires. Un délire qui voudrait s’imposer à tous… Mais un avis scientifique n’est qu’un avis, une aide à la décision. Ce n’est pas une décision. Et émettre l’avis qu’il faille 250 ours dans les Pyrénées présente l’avantage de nous montrer que la présence d’une population d’ours dans les Pyrénées et humainement, socialement, économiquement et environnementalement impossible sauf à vider toutes les Pyrénées de tous leurs habitants. Ne rêvons pas!

- Et pourquoi pas 250 ours (dans les Pyrénées)?

Il est des lectures heureuses. Seulement, il ne faut pas les louper. Or j’ai failli passer à côté du rapport nommé «Expertise collective scientifique “l’Ours brun dans les Pyrénées” du Muséum National d’Histoire Naturelle». Je dois reconnaître que le titre n’est pas engageant, mais si l’on se plonge dedans, cela devient passionnant. Si. Avant de commencer, deux mots sur l’Ours. Cet animal grandiose a été le vrai roi du territoire qu’on appelle la France pendant des centaines de milliers d’années. Et même quand les hommes ont commencé à défricher et à piéger, il demeurait une sorte de dieu sylvestre auquel les peuples présents ici rendaient d’innombrables cultes. Je renvoie à l’admirable livre de Michel Pastoureau, L’Ours, histoire d’un roi déchu (Le Seuil, 2007).

Le monde de la vitesse et de la machine pouvait-il cohabiter avec la Bête? En tout cas, il ne l’a pas fait. Le XXe siècle a marqué la fin du monde de l’Ours. Le dernier des Alpes a été aperçu en 1937, alors qu’il en restait une grosse centaine dans nos vastes Pyrénées. Et puis probablement 70 en 1954, et puis trente, et puis quelques-uns, et puis un seul, cantonné dans l’Ouest béarnais, entre vallées d’Aspe et d’Ossau. Il ne reste donc qu’un mâle héritier de cette prodigieuse histoire, que les hommes appellent Cannelito, né en 2004. Il poursuit sa vie au Béarn, sans pour le moment rencontrer âme sœur. Côté Béarn, c’est râpé, car en tout état de cause, il n’y aura plus jamais d’ours né d’un père et d’une mère pyrénéens. Précisons que Cannelito lui-même a pour père un ours «slovène».

Slovène? Oui, car parallèlement, et pardonnez si je survole, l’État a accepté sous la pression de quelques braves, parmi lesquels je souhaite citer Roland Guichard et Jean-François Breittmayer - il y en a d’autres, évidemment! -, une timide réintroduction. À partir de 1996, quelques ours ont été prélevés en Slovénie - un pays presque 30 fois plus petit que la France qui abrite…400 ours - puis relâchés dans les Pyrénées centrales, où il n’y en avait plus aucun. Vous avez sûrement entendu parler de Ziva, Melba, Pyros. Au total, huit ours ont été relâchés et compte tenu des naissances depuis, les Pyrénées comptent au moins 22 ours en liberté.

C’est dans ce contexte que paraît en septembre l’expertise du Muséum, rédigée par des spécialistes indiscutables, dont Luigi Boitani, un biologiste de réputation mondiale que j’ai eu l’honneur de rencontrer à Rome il y a une douzaine d’années. Que dit le texte? Des choses limpides: dès demain, nos splendides Pyrénées pourraient abriter 110 ours, car sur le plan biologique, les ressources sont là. Et même 250 si l’on prend en compte un territoire plus vaste où les ours circulent sans s’y installer. Mais la situation actuelle conduit au dépérissement et à la consanguinité. Non seulement les deux populations - Béarn et Pyrénées centrales - ne sont plus connectées, mais le pool génétique des ours «slovènes» est trop restreint. Dans le jargon des spécialistes, le statut des ours est jugé «défavorable inadéquat».

En fait, sans réintroduction rapide dans le noyau central, la consanguinité menace à dix-quinze ans, et peut-être avant. Il faut donc agir, et la meilleure façon de le faire est de renforcer simultanément les deux populations, celle du Béarn et celle des Pyrénées centrales. C’est «de loin le meilleur plan en ce qui concerne la viabilité de l’Ours brun dans les Pyrénées». En résumé, et pour seulement préserver les chances d’un avenir viable, il faudrait vite relâcher entre 7 et 17 ours. Pour les ennemis de la nature et de la vie sauvage, cette perspective est comme un chiffon rouge agité sous leur nez. Je crois que beaucoup d’entre vous n’imaginent pas la bassesse, l’imbécillité et la violence verbale de ceux qui réclament la mort des ours. Il faudra songer à faire un florilège de leurs délires, mais ce n’est pas le jour.

Ce jour est de gloire, car il n’y a aucun doute, et tous sont placés au pied du mur. Ou l’on trouve le courage d’avancer, sur un chemin certes difficile. Ou on laisse mourir une nouvelle fois les ours vivant dans les Pyrénées. Ce qu’on appelle une alternative. J’aimerais être sûr que tous les protecteurs de l’animal sont conscients que nous disposons d’une chance historique. Nous pouvons en effet entraîner toute une coalition en faveur de l’ours, soutenue par les plus hautes autorités scientifiques qui soient. Je sais le débat à l’intérieur du petit monde des associations, et je ne veux en la circonstance froisser personne. Chacun peut avoir son point de vue, mais je redoute une trop grande proximité avec les services officiels de l’État, peureux comme à leur habitude, et bien incapables de prendre en charge la lutte en faveur de la biodiversité. Je redoute un accord au rabais entre associations « raisonnables » et défenseurs intransigeants, dont j’estime faire partie. Pour une fois, au-delà de divergences bien réelles, et qui ne sauraient disparaître, dites-moi, vous tous amis de l’ours, ne pouvons-nous pas nous entendre ? Ne pouvons-nous pas exiger unanimement que l’impeccable avis scientifique du Muséum serve de base à toute signature et tout engagement ? Est-ce trop demander que de réclamer 17 ours de plus?

Je rêve, je sais. Mais je rêve réellement de 250 ours dans les chênaies-hêtraies du pays magique.

Auteur: Fabrice Nicolino
Source: Planete sans visa du 13 février 2014

- Les commentaires liés à cet article

Fabrice Nicolino écrit: «Où l’on trouve le courage d’avancer, sur un chemin certes difficile. Ou on laisse mourir une nouvelle fois les ours vivant dans les Pyrénées. Ce qu’on appelle une alternative. J’aimerais être sûr que tous les protecteurs de l’animal sont conscients que nous disposons d’une chance historique. Nous pouvons en effet entraîner toute une coalition en faveur de l’ours, soutenue par les plus hautes autorités scientifiques qui soient».

Est-ce les propos d’un militant ou ceux d’un journaliste?

Il ne faut pas oublier que les Pyrénées ne sont pas et n’ont jamais été depuis 6000 ans un territoire sauvage. Il y a toujours des hommes qui y vivent et y ont des activités. Vouloir imposer ses fantasmes s’appelle une dictature. Fabrice Nicolino est-il un dictateur?

Se référer en permanence à la Convention de Berne et à la Directive habitats est une excellente chose car elles préservent des comportements dictatoriaux environnementalistes. L’acceptation sociale s’impose. Et c’est un point curieusement toujours occulté par les défenseurs de l’ours.

Les ours qui sont dans les Pyrénées le sont artificiellement grâce à des importations dont la légalité est par ailleurs contestée tant les petites magouilles ont été nombreuses pour les imposer.

«Nous disposons d’une chance historique »… Qui est «Nous»? Les pyrénéens ont déjà donné une réponse en 2011. Et je mets au défi les organisations écologistes de trouver dans les Pyrénées «une coalition en faveur de l’ours». Sauf à imaginer des actions de force comme nous en avons connu il y a plusieurs années dans la vallée d’Aspe. Pour quel résultat?

Louis Dollo, le 15 février 2014