1 - Un enjeu planétaire : la survie des espèces menacées
La question
de la survie des ours dans les Pyrénées nest pas une
question posée seulement à la France. Elle fait partie dune
question plus vaste posée à lhumanité tout
entière, qui est celle de sa cohabitation, sur cette planète qui nous a vu naître et qui est notre seul milieu de vie possible, avec la nature dans ce quelle a de plus authentique.
Depuis cinquante
ans le développement des activités humaines est entré
dans une concurrence de plus en plus vive avec ce qui reste de nature
sauvage sur la terre. Sous toutes les latitudes, quil sagisse
de la terre ferme ou des océans, lhomme doit partout choisir
aujourdhui entre poursuivre un développement indifférent
des richesses de la nature, et alors inéluctablement la détruire,
ou bien trouver les voies dun développement non destructeur
de la nature.
Partout dans
le monde la question est posée, que lon pense aux baleines,
partout sur les océans, aux éléphants ou aux rhinocéros
en Afrique, au tigre de Sibérie, aux Tortues marines ou aux dizaines
de milliers despèces animales et végétales,
connues ou même encore inconnues aujourdhui menacées.
Chacun doit prendre sa part de responsabilité. Nous le demandons, pour ce qui est
leur part aux autres peuples.
Les ours font partie de la part des français.
2 - La décision du Gouvernement français : une perspective
à la fois ambitieuse et raisonnable
Dans ces conditions le Gouvernement ne pouvait se cantonner dans lattentisme
et linaction qui ont prévalu jusquen 2002.
En même temps
le Gouvernement ne peut ignorer les difficultés réelles
que pose de nos jours la présence de lours aux habitants
des Pyrénées.
Le Gouvernement a donc décidé de donner une perspective à
la fois ambitieuse et réaliste et, tout en agissant, de donner
à chacun et à tous les moyens et le temps de sadapter.
Lobjectif,
cest le doublement de la population dours dans le massif
pyrénéen dici à trois ans.
Ils sont aujourdhui,
entre 14 et 18 sur le massif pyrénéen. Lobjectif
est la trentaine fin 2008.
Laction sengage
dès cette année : le Gouvernement a décidé
de réintroduire cinq ours, et plutôt des femelles,
à lautomne prochain.
Il faut que nous ayons rapidement davantage doursons parmi nos ours.
3 - Un dialogue local approfondi va être conduit
Cette perspective et ce délai nous laissent le temps dun
véritable travail collectif daccompagnement et de dialogue.
Il nous reste à
décider, dici à lété, cest-à-dire
à fin juin de multiples paramètres :
- où auront lieu, en 2005, ces premières réintroductions
- doù viendront ces ourses réintroduites. Déjà les premiers
contacts diplomatiques ont été engagés avec lEspagne
la Croatie et la Slovénie.
- Dans quelles conditions
et avec quel accompagnement, sachant que plusieurs questions légitimes
et pertinentes ont été soulevées devant moi par
les maires, les conseillers généraux, les éleveurs,
les chasseurs et beaucoup dautres lors de mes deux derniers déplacements
dans les Pyrénées.
- A cet égard
dès les prochains jours, les Préfets assistés de
lensemble des services de lEtat compétents engageront
un important processus de concertation et de dialogue :
- avec les
maires de lensemble du massif pyrénéen,
dune part ; avec les représentants professionnels
et institutionnels (chambres dagriculture et syndicats
agricoles, représentants économiques,
.) avec
les associations enfin dont les fédérations de
chasseurs. Aux fins dy contribuer, une mission sera confiée
à deux inspecteurs généraux, lun issu
du Ministère de lAgriculture, Monsieur Alain ESCAFRE,
lautre du Ministère de lécologie, Monsieur
Eric BINET.
- Cette décision
du Gouvernement doit également saccompagner dune
démarche découte dhabitants des Pyrénées.
- Enfin jentends approfondir les relations avec nos partenaires espagnols et andorrans
pendant toute cette période : les Pyrénées
sont partagées avec eux.
Je suivrai personnellement
avec mon collègue Dominique BUSSEREAU, lévolution
de ces différentes formes de discussion et de dialogue. Elles
doivent conduire, à une définition précise des
actions daccompagnement qui seront nécessaires.
A lissue
des premières réintroductions, celles de 2005, nous disposerons
encore dune dizaine de mois pour mettre en uvre lensemble
de ces mesures.
" Je mengage
par ailleurs à évaluer régulièrement, les
actions qui seront conduites, la première fois au plus tard en
juin avant de décider définitivement des lieux et modalités
dintroduction pour 2005."
Ce processus permet
à lInstitution Patrimoniale du Haut Béarn, qui a
lancé de longue date une démarche de concertation très
approfondie, de poursuivre la constitution du dossier de réintroduction
décidé en 2004 et lensemble des consultations quelle
a prévues sans être perturbée.
4 - Cette décision sintègre dans le perspectives davenir
pour le massif pyrénéen.
Dune
part lours est demeuré présent dans le massif des
Pyrénées. Il nen a fort heureusement pas disparu.
La question posée nest pas celle de son retour mais celle
de sa survie à long terme.
Dautre part,
quil y ait ou non de nouvelles introductions dours, le monde,
les conditions économiques notamment, continuent à évoluer
très vite et à nous forcer à nous adapter : quil
y ait ou non réintroduction dours, lactivité
pastorale va continuer à évoluer dans les dix prochaines
années comme elle na cessé dévoluer
jusquà présent. Elle nest pas figée.
Lenjeu de
la survie de lours ne nous impose pas, à lui seul, de faire
évoluer nos conceptions, nos pratiques et nos habitudes.
Même sans lui il nous faudrait nous adapter.
Lenjeu de la survie de lours impose donc seulement dintégrer
les spécificités liées à sa présence,
dans ces évolutions inéluctables. Il sagit seulement
de mieux en prendre conscience et de mieux tenir compte.
5 - Lhumanité est solidaire dans le combat pour sauver de
la destruction les espèces menacées
Chaque pays, chaque continent, doit faire des efforts pour renverser les pratiques,
économiquement, socialement, culturellement légitimes
jusquà ce jour, mais qui, si nous les laissions durer,
condamneraient des milliers et des milliers despèces vivantes
à la disparition.
Imaginerions un
monde sans les baleines, sans les tigres, sans les éléphants
sans les requins, sans les pandas, sans la multitudes doiseaux,
dinsectes, de plantes aujourdhui menacés ?
Ce que nous demandons
aux autres pays du monde, chacun concerné par lune ou lautre
de ces espèces, de quel droit pourrions-nous nous en abstraire
pour les espèces menacées qui vivent chez nous ?
Sans doute sauver
les ours des Pyrénées ne se fera pas pour nous sans efforts
mais cest une part de lavenir de lhumanité
qui se joue là. Une part dun enjeu crucial où
lhumanité na pas dautre choix que de réussir.
Nous avons le temps
pour y réfléchir (dici à juin), puis pour
agir, évaluer et enfin adapter régulièrement nos
actions.
Nous en avons les moyens. Nous en sortirons tous plus fort.
Cest ce beau défi que je propose de relever.