Les trois ours en peluche pendus mercredi sous le pont de lAlma
à Paris ne seront pas morts pour rien ! La scène a dû
suffisamment émouvoir Chantal Jouanno, la secrétaire dEtat
à lEcologie. A moins que ce ne soit la menace de perdre
le soutien des associations Ferus et Pays de lOurs-Adet, qui militent
pour la réintroduction du plantigrade dans les Pyrénées.
«La France inaugure lannée internationale de la
biodiversité de la plus mauvaise manière», avertissaient-elles.
Outre cette pendaison symbolique, elles promettaient chahuts et pétitions
pour dénoncer le «non-respect» des engagements gouvernementaux.
«Ravis».
Le premier programme de réintroduction lancé en 2004 sest
achevé le 31 décembre 2009 (1). Au 20 janvier 2010, rien
encore ne sy substituait. Mais, le soir même du sacrifice
des nounours, Chantal Jouanno est intervenue sur les antennes de France
3 Régions à Toulouse pour assurer quelle ne laisserait
pas lours disparaître de ces montagnes. «Nous sommes
ravis, déclare une porte-parole de Ferus, Sandrine Andrieux-Rolland.
Même si Chantal Jouanno est restée vague sur les modalités
et le calendrier des opérations, elle nous donne lassurance
que les réintroductions vont reprendre.»
Dès cet
automne, les deux associations avaient commencé à se plaindre
de la panne apparente de ce plan. «Lours brun des Pyrénées
est en danger critique dextinction», répétaient
leurs militants, réclamant un nouveau plan de restauration avec
deux ou trois lâchers dours par an. La vingtaine danimaux
encore en circulation sur les pentes pyrénéennes ne suffirait
pas, selon eux, au maintien de lespèce. Exemple est donné
du Béarn, où ne survivent que trois mâles
Cette population ne serait stabilisée, précisent-ils,
quà partir dune quarantaine de représentants.
«La Joconde».
La dernière réintroduction dun mâle et de
quatre femelles capturés en Slovénie date de 2006. Mais
les bergers montagnards ont tenté de la contrarier de toutes
les manières, jusquà ouvrir un front du refus. «Que
les écologistes ne viennent pas nous dire comment nous, montagnards,
devrions vivre dans nos montagnes ! Lours ne sert à rien»,
écrit un internaute sur Libétoulouse.fr. Qui se voit répondre
sur le même canal : «Certes, mais alors à quoi
sert la Joconde ?»
Cette bataille,
qui voit saffronter jusquà la caricature le monde
rural à celui des villes, est sociétale. Lannonce,
même feutrée, de Chantal Jouanno pourrait rallumer le feu.
Lassociation Ferus lui laisse le temps de composer. «Nous
resterons vigilants, explique ainsi Sandrine Andrieux-Rolland.
Mais nous avons cru comprendre que rien ne serait fait avant les élections
régionales.»
Auteur : Gilbert Laval correspondant à Toulouse
Source : Libération
du 22 janvier 2010