Ces Meutes de loups qui émeuvent les hommes 2009

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La présence de plus en plus pressant des loups dans les alpages, à proximité des fermes et jusque dans les villages et les villes émeut les gens

Ils étaient réapparus dans les Alpes il y a seize ans. Ils ont ensuite franchi le Rhône et sont désormais installés dans le Massif central, ce qui ravive les tensions entre bergers et associations de protection des animaux.

Des empreintes de loups ont été observées en janvier dernier dans les Cévennes enneigées, au nord-ouest d'Avignon. Un garde forestier a également affirmé avoir vu un loup près de la carcasse déchiquetée d'un veau nouveau-né, à proximité du village cévenol de Bondons. Ces loups venus d'Italie ont commencé à recoloniser les Alpes françaises il y a seize ans, suscitant des tensions entre bergers et défenseurs des animaux et entre bergers pro- et anti-loups. D'après les traces retrouvées dans les Cévennes, plusieurs animaux auraient passé leur deuxième hiver dans les montagnes, de l'autre côté de la vallée du Rhône. Or, pour les biologistes, deux hivers successifs suffisent à définir une présence permanente.

Ces deux dernières années, la présence de loups solitaires a été observée - et confirmée - dans d'autres endroits du Massif central, jusque dans le Cantal. Jusqu'à présent, pourtant, il restait encore à démontrer que des colonies de loups avaient commencé à s'installer dans ce vaste territoire montagneux situé à l'ouest du Rhône, d'où ils avaient été chassés jusqu'à disparaître complètement à la fin des années 1930.

"C'est un événement extraordinaire mais il était parfaitement prévisible", assure Daniel Véjux, l'un des grands spécialistes du loup en France. "Le besoin de trouver des proies allait forcément conduire à un moment ou un autre les jeunes loups à chercher de nouveaux territoires de chasse. Désormais, à moins qu'ils ne soient à nouveau exterminés par l'homme, rien ne viendra les empêcher de coloniser les milliers de kilomètres carrés du Massif central et du Limousin dans les vingt prochaines années."

Cette nouvelle a suscité de vives inquiétudes chez les bergers de Lozère. Joël Bancillon, porte-parole départemental de la Confédération paysanne, n'est pas optimiste. "Notre seul problème, jusqu'à présent, c'étaient les chiens sauvages. Mais, si cette nouvelle est confirmée, je peux vous dire qu'il y aura des grincements de dents. Dans les Alpes, les bergers ont été forcés d'adopter des mesures de protection, mais cela n'a pas empêché leurs troupeaux d'être décimés." Une affirmation réfutée par les associations de protection des animaux et même par certains bergers alpins. Selon M. Véjux, également membre du comité national de l'Association pour la protection des animaux sauvages, "si les moutons sont bien protégés, le loup n'ira pas les attaquer. Il ne courra pas le risque de se faire blesser par les chiens et préférera chercher ses proies dans la forêt. Mais, si vous laissez les moutons sans protection, alors vous lui facilitez la tâche..."

Depuis que des loups italiens ont commencé à recoloniser les Alpes françaises, au début des années 1990, la guerre est déclarée entre les amis des bêtes et certains bergers. Les loups, qui, selon les lois françaises et européennes, sont une espèce protégée, n'ont pas été épargnés par les empoisonnements, pièges et coups de fusil. Même les troupeaux des bergers ayant accepté la présence de loups et adopté de nouvelles formes de protection pour leurs bêtes ont été pris pour cible.

Le dernier spécimen de loup né en France avait été abattu dans le Massif central en 1939. Les loups avaient déjà été chassés des Alpes françaises à la fin du XIXe siècle. En 1991 et 1992, les loups italiens ont commencé à passer la frontière des Alpes. Sans être une menace pour les hommes, ils ont presque immédiatement commencé à attaquer les troupeaux.

Pour certains groupes militants de bergers et d'élus locaux, les loups auraient été réintroduits en secret par les écologistes. Des tests ADN sur des dépouilles de loups ont montré que les nouveaux arrivants étaient bien issus des populations italiennes.

Les chiens errants menacent davantage les troupeaux
On estime à 100 ou 120 le nombre de loups résidant en France, répartis en une douzaine de meutes. En 2004, le gouvernement français a mis en place un plan loup pour apaiser les esprits et protéger les animaux. Une permission d'abattre six loups par an a été accordée. Les bergers ont reçu des subventions afin de protéger leurs troupeaux avec, par exemple, des clôtures électrifiées et une surveillance permanente nuit et jour par des chiens et des bergers l'été (souvent des étudiants).

Le plan a été un succès mais, pour certains bergers des Alpes, l'arrivée du loup a perturbé une industrie des alpages déjà fragile. Cependant, d'après les défenseurs de la nature, chiens errants, maladies et éboulements font chaque année plus de victimes dans les troupeaux que les loups.

La vallée du Rhône, avec ses autoroutes, ses lignes de chemin de fer et sa forte densité de population, sans parler de la largeur du fleuve, n'aurait-elle pas dû, pourtant, constituer une barrière infranchissable pour un jeune loup? "Pas du tout, répond M. Véjux. Un loup peut parcourir 60 kilomètres en une nuit. Il peut traverser un fleuve à la nage et circuler dans les zones urbaines sans se faire remarquer ou passer pour un chien. Ce sont des animaux très intelligents et doués de grandes facultés d'adaptation."

Auteur: John Lichfield
Source: Le courrier international du 5 mars 2009